Interview intéressante de Cris datant d'il y a 3 jours :
Avez-vous revu le match face à Tel Aviv?
Non. Qu’on gagne, qu’on perde, je n’aime pas revoir les matches. Je sais quand j’ai bien joué ou pas. Je sais me remettre en question. Là, tout est à remettre en question. Tout et tout le monde. C’est un problème tactique, technique ou mental? Plutôt mental. Comme on sortait de deux matches pourris, à Benfica et à Schalke, on a voulu marquer vite. N’y arrivant pas, on a commencé à s’énerver et on a multiplié les erreurs. L’équipe était déséquilibrée. Mais bon, ça fait neuf matches qu’on ne perd plus en Ligue 1. Après la trêve, j’espère qu’on sera à la fois bons en championnat et en Ligue des champions.
Comment expliquez-vous ces difficultés?
On a beaucoup de questions et peu de réponses. Parfois, on fait de bonnes entames de match avant de se désunir. Ou l’inverse. On manque de constance. On fait des erreurs de gamins. On oublie le b.a.-ba. Il suffirait de se parler un peu plus, de se regarder en face. Vous avez changé plusieurs fois de défense centrale.
Souhaitez-vous que Puel en installe une?
Pour les trois prochains matches, oui. Sur l’ensemble de la saison, c’est difficile. Il aime bien donner du temps de jeu à tout le monde. A chaque match, il change deux, trois, quatre joueurs. Ce n’était pas le cas de Houllier, Le Guen, ni même Perrin. C’est sûr qu’il vaut mieux connaître les gens qui évoluent à côté de toi.
Entre Diakhaté, Lovren et vous, quelle est la charnière idéale?
Toutes les associations ont bien fonctionné à un moment ou à un autre. Mais en ce moment, on manque de confiance tous les trois.
Lyon prend plus de points avec vous: 1,87, contre 1,37 sans vous...
Je n’aime pas les statistiques. Et puis la différence n’est pas énorme, hein?
Votre surnom, "Le Policier", est dur à porter en ce moment. Certains vous ont même traité de "gendarmette" cette semaine…
(Il rit). Je connais le film! C’est très français… Je n’ai rien à dire pour ma défense. Mais je n’écoute pas les commentaires. Quand je verrai que je n’ai plus le niveau, je serai le premier à dire stop.
Reverra-t-on un jour le meilleur Cris?
Je suis toujours au très haut niveau. Mais il va être dur de redevenir ce que j’ai été. Je n’arrive plus à tirer les autres vers le haut. A une époque, l’équipe marchait très bien. Aujourd’hui, on sent la pression des résultats. Cela fait trop pour certains de mes équipiers. Les seuls qui sont vraiment bien, ce sont Hugo Lloris et Lisandro Lopez.
Comment l’expliquer?
On a de très bons joueurs, mais on n’arrive pas à développer leurs qualités collectivement. On n’a plus la gagne. Avant, on jouait tous ensemble. On savait qu’on allait s’imposer. On a perdu cette confiance. Il faut arrêter de ne penser qu’à soi. Parfois, il y a trop d’individualisme. Il faut se rentrer ça dans la tête: le foot, ce n’est pas le tennis, ni le golf.
Vous pointez des joueurs en particulier?
Non, c’est chacun son tour. J’ai déjà passé le message en interne. Malheureusement, je crois qu’il n’a pas été reçu.
Est-ce à l’entraîneur, voire au président, de le marteler?
Non. Il faut oublier le coach, le président, les supporters. C’est aux joueurs d’agir. Il faut serrer les dents et aller de l’avant. Sinon, on est repartis pour la 2e ou la 3e place.
Paolo Maldini a dénoncé l’individualisme de Yoann Gourcuff. Vous le constatez aussi?
Chacun a sa vie, sa personnalité. Comment reprocher ça à Yoann? Il est tranquille, réservé. Je ne parle pas beaucoup avec lui. Mais je le vois rigoler aux blagues, raconter aussi des histoires. Il est bien intégré.
Comme Jérémy Toulalan, il ne semble pas remis de la Coupe du monde?
Je les sens encore touchés. L’histoire du bus, c’est impardonnable. Jérémy, il a eu des problèmes à cause d’une phrase sur les joueurs de 98 ("France 98 nous fait chier"), une histoire d’avocat et de lettre (il est à l’origine de la lettre des Bleus lue par Domenech en Afrique du Sud)… En plus, il a débuté la saison comme défenseur. Au fond, je pense qu’il ne voulait pas. Il n’est pas prêt pour ça. En défense centrale, il faut garder ton poste. Lui, il fallait toujours le rappeler: il était à droite, à gauche, devant… Dans deux ou quatre ans, il pourra se reconvertir.
Parenthèse: Blanc a rebâti l’équipe de France avec une charnière Mexès-Rami. C’est le choix que vous auriez fait?
Rami, avec ses grandes jambes, sa vitesse, sa technique, il ressemble à Lucio, le défenseur de l’Inter. Mexès, il est très régulier en Italie. Pour moi, Squillaci est le troisième. Ce qui est important, c’est que Laurent Blanc a choisi sa charnière et lui a donné toute sa confiance. Résultat: ça marche pas mal et elle va encore s’améliorer. Choisir et faire progresser, c’est le métier d’entraîneur.
Comment vit le vestiaire de Lyon? Vous citez souvent en exemple l’époque d’Abidal, Wiltord…
Ouh, là! On ne peut pas comparer. Avant, on rigolait vraiment. On arrivait une heure avant l’entraînement. Après, on restait au bar, on faisait un baby-foot. C’était naturel. Là, on a demandé un billard, une PS3. On commence à vivre ensemble. Ça tient aussi aux résultats. Quand on ne joue pas bien, on n’a qu’une envie, c’est de retrouver sa famille. Mais c’est en train de changer.
Êtes-vous inquiet?
Quand on était 18e, franchement, je l’étais. Là, un peu moins. Je suis surtout énervé. Je n’aime pas perdre. Et ça ne passe pas avec l’âge!
Est-ce la moins bonne équipe de Lyon que vous ayez connue?
Sur le terrain, oui. Mais en qualité pure, c’est la meilleure. Encore mieux qu’à l’époque de Tiago, Malouda, Essien… On a beaucoup d’individualités avec quelque chose de spécial.
Qui est votre favori pour le titre?
Lille. Ça fait deux ou trois ans qu’ils jouent ensemble, qu’ils sont bons et ne lâchent qu’à la fin du championnat. Je pense qu’ils sont désormais vaccinés.